À la recherche du père de nos truffes.

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melano
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À la recherche du père de nos truffes.

Message par melano »

Bonjour,

J'ouvre un nouveau fil de discussion pour évoquer un des aspects encore méconnu du cycle de la truffe : la fabrication des gamètes mâles qui vont féconder le filament maternel issu d'une mycorhize.

En effet. Lorsqu'on cherche le père après les racines de l'arbre, on ne le trouve pas. On trouve aussi en général la mère dans le sol à proximité des racines qu'elle tient.

Où est donc le père de nos truffettes?

Plusieurs possibilités :
- il est sur les racines ou dans le sol d'un arbre voisin de mating type différent. Probable. Lors des études, on a montré que les échanges entre individus sont d'autant plus fréquents qu'ils sont proches. Mais cela peut aller jusqu'à 20 m. En gros, sur la truffière, des zones sont tenus par des individus de type 1 1 1 et d'autres par des individus 1 2 1. Il peut y avoir des échanges et fécondation possible.

- il existerait dans le sol des individus vivants de manière indépendante des racines qui boucleraient leur cycle via de la reproduction asexuée de type dispersion par microconidies. Ces individus seraient capables de coloniser les zones tenues par les mères pour participer à la fécondation. Ce type de mycélium a été mis en évidence chez certaines truffes ; on a vu les photos hier. Cela se présente sous la forme d'une moisissure blanche à la surface du sol. M Le Tacon a demandé à l'assistance de lui signaler si un jour on voyait ça sous les arbres. Il est près à se déplacer pour venir analyser le phénomène. Alexander Urban avait déjà évoqué cette possibilité à Brive lors du colloque de l'an dernier.

- hypothèse non évoquée hier : les spores.

Voilà. Ça avance de ce côté là aussi. Une chose est sûre, c'est qu'il convient compte tenu du besoin d'assurer une grande mobilité des différentes souches dans l'espace de culture de veiller à avoir un sol très aéré et/ou une faunes très diversifiée pour transporter les structures mycéliennes parfois sur de grandes distances entre les zones tenues par les types différents.

Fred

PS : pour ceux qui auraient du mal avec le vocabulaire du cycle de la truffe ==> page 6 de ce doc : http://www.lessources-cnb.be/bota_monde-mycologique.pdf

Et aussi le cycle des ascomycètes de ce doc : http://biosol.esitpa.org/liens/champ_20 ... _repro.htm
à la différence près qu'à mon avis pour la truffe, en 1 du cycle, il faut inverser anthéridie et ascogone car le cycle de repro asexué 7 concerne le père pour nous (la femelle étant inféodée aux racines indépendamment de son mating type)

Ça suit dans le fond ou ça roupille? :lol:
jacques 37
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Re: À la recherche du père de nos truffes.

Message par jacques 37 »

Arrête de réveiller les cancres du fond de la classe... C'est vrai que c'est ton boulot de tous les jours donc ça devient mécanique chez toi !!!! :lol:
Encore merci Fred pour tous les néophytes comme moi qui de temps en temps se noient dans tous ces termes techniques. :wink:
Jacques 37
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melano
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Re: À la recherche du père de nos truffes.

Message par melano »

Ben le but du post, c'est d'expliquer, d''essayer de comprendre et surtout de faire la relation avec ce qui est observé sur le terrain.

Par exemple, un point commun à de nombreuses truffières à bon rendement c'est d'avoir été travaillées sur toute la surface pendant au moins trois ans.

Cela doit sacrément faciliter la migration des souches de truffe dans le sol. Donc, c'est en accord. Les tracteurs lourds sur sol mouillé, ça tasse, ça doit sacrément limiter la migration : pas bon.

Donc n'hésitez pas à faire vos remarques. C'est comme ça qu'on avancera.

Fred
J Gravier
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Re: À la recherche du père de nos truffes.

Message par J Gravier »

OK Fred ça roule.... hé dans le fond, on s'accroche.....
Puisque les spores sont issues de l'ascocarpe (la truffe), elles sont soit de type - soit de type + .....
Lorsqu'elles germent elles génèrent des hyphes + ou - .... si l'arbre est bien équilibré au départ 121 il va donner des ascocarpes qui plus tard vont assurer du mycélium + et - au fur et à mesure que les spores rencontreront des conditions favorables pour germer.... donc même si cet arbre tend vers 111 il devrait y avoir possibilité de production de truffes....grace aux spores présentes dans le sol....
et donc tant que les truffes ne sont pas récoltées l'espèce peut se perpétuer dans le temps.... et prospérer.... les bébêtes assurant largement la dispersion des spores

Mais ceci dit, s'il suffit d'avoir du mycélium + et - pour qu'un accouplement et une naissance de truffe soit possible, alors deux mycéliums issus de spores pouraient peut être suffire pour avoir un accouplement et naissance d'une truffette, le mycélium issu des mycos pourrait alors devenir une sorte de cordon ombilical ou de "cocon", une sorte de "placenta", reliant l'arbre à la truffe..... de la densité et de la qualité de ce mycélium dépendrait peut être sa survie.....

Deux autres cas seraient possible: 1) un mycélium de type - issu d'une spore qui s'accouple avec un mycélium de type + issu d'une myco
2) un mycélium de type + issu d'une spore qui s'accouple avec un mycélium de type - issu d'une spore

Il faut rester prudent quand on extrapole du connu vers l'inconnu, la description de la biologie de quelques ascomycèces connu ne fait pas que tous les ascomycètes doivent systematiquement entrer exactement dans ce schéma.... il pourait y avoir quelques variantes possibles que l'on découvre petit à petit.... x sous groupes pouraient alors être déterminés....

joel
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david19
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Re: À la recherche du père de nos truffes.

Message par david19 »

melano a écrit :
Cela doit sacrément faciliter la migration des souches de truffe dans le sol. Donc, c'est en accord. Les tracteurs lourds sur sol mouillé, ça tasse, ça doit sacrément limiter la migration : pas bon.

Fred
Oui mais un coup de sous-soleuse a la fin d'été ou début automne sur terrain sec , juste dans l'inter-rang doit bien facilité la propagation des souches .

David
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tuber01
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Re: À la recherche du père de nos truffes.

Message par tuber01 »

2 myceliums de spores, un + et un -, pourraient peut etre donner une truffette.
Mais comme elle n'aurait pas son cordon ombilical avec l'arbre, elle ne survivrait pas... Peut être une raison qui expliquerait le fort taux de pertes de celles ci.

En l'état actuel des connaissances, je pense qu'on peut considérer que tout est possible et qu'il faut favoriser les spores dans le sol (ne pas hésiter à amender), et favoriser la rencontre de myceliums d'arbres voisins (via un sol ameubli et non tassé).

Ca serait interessant de connaitre le "signe" des plants à la plantation et de les planter par 2 (à 50cm par exemple), un male et une femelle. Comme les kiwis :-)
Voire planter des ilots de 2 femelles et 1 male ...

Seb
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J Gravier
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Re: À la recherche du père de nos truffes.

Message par J Gravier »

Peut être celà expliquerait il en partie la pérénité et la précocité de certains "doublons" chez moi.....
jacques 37
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Re: À la recherche du père de nos truffes.

Message par jacques 37 »

tuber01 a écrit : Ca serait interessant de connaitre le "signe" des plants à la plantation et de les planter par 2 (à 50cm par exemple), un male et une femelle. Comme les kiwis :-)
Voire planter des ilots de 2 femelles et 1 male ...
Seb
Connaitre le signe de chaque plant serait sans aucun doute un élément essentiel afin de pouvoir apporter la preuve de ce qui est avancé.
J'ai planté 300 arbres format haie c'est à dire espacés chacun d' 1,50m, avec l'introduction sur une haie à chaque extrémité de celle-ci, 20 arbres à chaque extrémité, espacés eux de 0,50m.
Je pense que la probabilité doit être plus grande sur une quantité plus importante d'avoir cette rencontre :!: :roll:
Jacques 37
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melano
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Re: À la recherche du père de nos truffes.

Message par melano »

Deux choses :

- dans son exposé, M Le Tacon faisait passer le mycélium issu de la spore par le stade mycorhize avant de faire un mycélium pouvant se reproduire. Ce qui laisserait sous entendre que le mycélium primaire, issu d'une spore n'en est pas capable. Il faudrait tenter de savoir si le mycélium issu d'une spore peut produire un ascogone ou une anthéridie ("gamètes").

- dans une truffière, sur 10 plants, on en a statistiquement 5 de type 1 2 1 et 5 de type 1 1 1. La répartition des arbres devrait être aléatoire (et elle l'est à la plantation).

Lorsqu'on étudie la répartition quelques années plus tard, on s'aperçoit que des zones entières de plusieurs (dizaines?)arbres sont devenus des zones 1 1 1 ou d'autres des zones 1 2 1. A l'intérieur de ces zones, il y a eu changement de statut de tous les arbres qui n'étaient pas du signe final.

Donc, même en plantant en doublon ou en îlot, on un plant sur deux, on n'est vraiment pas sûr de favoriser la répartition alternée des deux types.

Je vais relire dès que je le retrouve l'article de Rubini sur les travaux en Italie. L'article sur les travaux français est en cours de rédaction et devrait sortir sous peu dans The new physiologist.

En attendant, j'avais fait un résumé assez indigeste par là bas. :wink:

viewtopic.php?f=4&t=2366&p=49268&hilit=rubini#p49268

Fred
ventoux
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Re: À la recherche du père de nos truffes.

Message par ventoux »

A mon avis vous avez tous juste. Je suis passionné par la nature dans toutes ses formes mais plus particulierement par le monde végétal et le fontionement des sols.
Les apports de spores sont très important pour la polarité (le + ne peut se reproduire sans le - comme dans 99,9°/° de la vie sur terre).
Pour les rencontres un sol très aéré et une vie biologique intense (un peu comme le net)

Nicolas
J Gravier
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Re: À la recherche du père de nos truffes.

Message par J Gravier »

J'ai relu ton post Fred, il n'y a donc plus que les spores pour faire la reproduction sexuée.... ça me semble clair.... mais comme ce n'est pas une chose qui existe chez les autres ascomycètes les chercheurs ne "voient" pas ce qu'ils ont sous les yeux...

joel
hanc07
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Re: À la recherche du père de nos truffes.

Message par hanc07 »

Bonsoir,
il me semble que vous êtes en train de remettre complêtement en cause les principes de plantation traditionnel.
Des rangées d'arbres aligné au cordeau, espacé de 5 à 6 m entre les arbres et entre les rangs.
Au final vous allez nous conseiller de plants en bouquet plus arbres de provenance différents et la encore favoriser la mycorhisation en apportant des spores supplémentaires.
Dans une truffière naturelle, nous devons être nombreux a avoir constaté qu'en effet rien n'est aligné et qu'il est évident que les sustèmes racinaires se croisent!
il va falloir faire un essai pour breveter cette idée!
J'essai de suivre, merci de commenter cette idée.
Bonne journée
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melano
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Re: À la recherche du père de nos truffes.

Message par melano »

Salut Hanc,

une truffière travaillée plusieurs fois par an, où les arbres sont taillés, arrosés, sarclés, bombardés de spores de truffes n'est pas vraiment comparable avec le milieu naturel. C'est toute la différence qui existe entre un agrosystème et un écosystème.

Mais rien ne t'empêche de planter tes arbres en pagaille si tu n'aimes pas les lignes droites. :wink:

Sinon, j'ai relu l'étude de Rubini. La zonation des types MAT existe. Les mères tiennent des zones parfois étendues en étant présentes dans les mycorhizes d'un arbre, dans le sol et dans la gléba des truffes. Dans la plupart des cas, les pères identifiés dans les spores sont connus et présents dans les échantillons relevés lors de l'étude. Ce sont en fait les mères situées à quelques centaines de m de là.

Quelques pères sont inconnus mais ils n'ont pas échantillonnés tous les arbres non producteurs non plus.

Donc, tout laisse à penser que les truffes peuvent coloniser le sol sur de très grandes distances. Des phénomènes d'attractions basés sur la libération de phéromones spécifiques reçues par des récepteurs dont le gène est connu doivent faciliter la tâche.

L'étude française nous en dira peut-être plus.

Fred
jjr24
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Re: À la recherche du père de nos truffes.

Message par jjr24 »

Bonjour,

Donc, si je comprends, une spore "mère" ne peut devenir ou plutôt produire un "père" grâce à un signal que recevrait une bactérie/micro-organisme :?: pour produire de la truffe :!: :?:
Cordialement;JJR24
J Gravier
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Re: À la recherche du père de nos truffes.

Message par J Gravier »

Bonjour à tous,

attention moi je suis très méfiant concernant la description de la biologie des ascomycètes, ok pour certains puisque des observations ont été faite, mais de là a extrapoler et a dire que tous se comportent de la même façon est trop restrictif, c'est malheureusement une limite que rencontre trop souvent la recherche, quand on ne sait pas on essaie de faire entrer le "problème" dans quelque chose de déjà connu..... la plupart des chercheurs qui "trouvent" et ils sont très rare, sont ceux qui ont imaginé avant de chercher à démontrer, ou à observer là ou personne n'avait jamais "ouvert les yeux"...
Ces messieux ont le même problème que nous producteur.... le poids de l'héritage.....
Pour en revenir à nos moutons, a t on déjà observé une reproduction assexuée chez la truffe, c'est à dire production de spores autrement que par la truffe.... non !!! or chez les ascomycètes connus oui !!!
Donc pour moi on cherche à comparer des choses incomparable, il y a differents sous groupes chez les ascomycètes.... reste à trouver lesquels et comment ils fonctionnent....

joel
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